La maison mère du principal site pornographique en France, Porn***, a décidé de suspendre l’accès à ses plateformes depuis la France, pour ne pas se conformer à la décision de l’Arcom sur la vérification de l’âge, nous rapporte La Croix le 1er septembre.
Cinq sites pornographiques de plus ont pris des mesures de vérification d’âge, a annoncé jeudi 28 août l’Arcom, le gendarme des médias français, qui les avait mis en demeure deux semaines auparavant. À l’exception des sites du groupe Aylo (Porn***, You***), qui ont préféré suspendre l’accès à leurs contenus en France, les principales plateformes du secteur se sont désormais conformées à la loi française.
« On a dû se battre politiquement et juridiquement, mais on constate que cette insistance a porté ses fruits. » Sans pour autant crier victoire, le président de l’Arcom, Martin Ajdari, a dressé en cette fin d’été, auprès de La Croix, un premier bilan « très positif » de la démarche de mise en conformité de l’industrie pornographique, désormais contrainte par la loi de s’assurer que seuls les plus de 18 ans aient effectivement accès à ses contenus en ligne.
Les uns après les autres, sous la menace d’un blocage par l’Arcom, une dizaine de sites pornographiques parmi les plus populaires au monde ont fini par obtempérer depuis ce printemps, en consentant – rarement de bonne grâce – à mettre en place un outil numérique conforme aux exigences des autorités françaises pour vérifier la majorité de leurs utilisateurs. Exit le simple clic qui prétendait « certifier » jusque-là avoir plus de 18 ans et qui permettait à plus de la moitié des garçons de 12 ans de se rendre chaque mois sur ces plateformes pour adultes.
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Derniers sites à s’être mis à vérifier l’âge de leurs utilisateurs en France : cinq plateformes, dont les deux géants gratuits X*** et ****ster, établis respectivement en République tchèque et à Chypre. Jeudi 28 août, plus de deux semaines après les avoir mis en demeure – le 4 août –, l’Arcom a annoncé dans un communiqué la mise en conformité de ces cinq sites, renonçant du même coup à engager une procédure de blocage.
Début mai, d’autres sites mis en demeure avaient échappé de peu à la sanction en se mettant in extremis à vérifier la majorité des internautes – des plateformes basées en France, celles-là. Chat***, par exemple, avait alors commencé à proposer à ses utilisateurs de faire un scan de leur visage via le logiciel Face Age. Pour l’heure, l’Arcom n’a mis ses menaces à exécution que pour une plateforme : ***chat, bloqué depuis le 6 mars dernier.
« Contrairement à ce que ces sites nous ont longtemps répliqué, il existe des solutions techniques sur le marché, et elles fonctionnent », soutient Martin Ajdari, qui affirme : « Aujourd’hui, les sites pornographiques les plus fréquentés installés en France et ailleurs se sont conformés à la loi, à l’exception de ceux du groupe Aylo qui a préféré se retirer. » Début juin, la maison mère de Porn***, ***Porn ou Red*** a en effet préféré suspendre l’accès à ses plateformes depuis la France plutôt que de se conformer aux exigences de l’Arcom. Elle invoque notamment des risques pour la vie privée de ses utilisateurs. La loi française exige pourtant que parmi les outils de vérification de l’âge installés sur ces sites, au moins un respecte le principe de double anonymat, qui permet de prouver sa majorité sans divulguer son identité.
Un « retard » dû à une bataille judiciaire
Au début de l’été, le bras de fer s’est exposé jusque dans des tribunaux. Le 16 juin, le tribunal administratif de Paris a suspendu l’arrêté qui imposait depuis février la vérification de l’âge aux sites basés dans l’Union européenne, et qui avait été contesté en justice par les plateformes concernées. Un mois plus tard, le 14 juillet, le Conseil d’État invalidait cette décision et rétablissait l’arrêté. Porn*** et You***, qui avaient brièvement fait le retour en France dans cet intervalle de temps, disparaissaient alors de nouveau des écrans.
Martin Ajdari déplore que cette bataille judiciaire ait fait « prendre du retard » à la démarche menée par l’Arcom, mais il se réjouit que la France ait été « pionnière » dans la « prise de conscience qu’il n’est plus possible pour ces sites ne pas vérifier l’âge de leurs utilisateurs ». Prise de conscience désormais partagée à l’échelle européenne, si l’on en croit les lignes directrices publiées à la mi-juillet par la Commission européenne pour la bonne application du règlement sur les services numériques (DSA) – auxquelles la France a d’ailleurs largement contribué.
Après s’être occupé des sites pornographiques aux plus grosses audiences, l’Arcom entend « s’attaquer à la strate suivante », en continuant d’établir des priorités en fonction de la popularité de chaque plateforme. « Nous continuons résolument l’action et ne resterons pas l’arme au pied », prévient Martin Ajdari.
Cependant, une question demeure : que faire pour la prévention et l’accompagnement des adultes, de plus en plus nombreux à être victimes de cette addiction au porno dont les effets sont dévastateurs ? Et toi, qu’en penses-tu ? Viens en discuter avec nous sur le chat’ ! (discussion anonyme et gratuite)
